Qu’est-ce qu’une grainothèque ?

Des grainothèques ont fleuri un peu partout ces dernières années en Wallonie et à Bruxelles. Il s’agit de banques de semences mises à disposition des citoyens gratuitement. Les semences sont reproductibles, non F1, si possible locales et produites dans des milieux où on n’utilise pas de pesticides.  On y retrouve des semences de fruits, légumes, plantes médicinales, plantes sauvages et également d’arbres et d’arbustes. Le principe est très simple : chacun prend ce qu’il veut. De manière à encourager leur essor, les citoyens sont invités à réaliser des dons à leur tour. Ces bibliothèques de semences sont très souvent mises à disposition dans les Bibliothèques communales des villes wallonnes et de Bruxelles. Les semences sont la plupart du temps rangées dans des étagères ou des boîtes de rangement créées avec amour (cf. ci-dessous).

Les grainothèques mobiles

Lorsqu’il n’est pas possible d’intégrer les bibliothèques – car elles sont absentes dans une commune par exemple – les grainothèques deviennent mobiles. Il fallait y penser. A Beauvechain, Michèle Maton emmène avec elle la grainothèque mobile aux activités citoyennes de Beauvechain en transition. Anne-Catherine Schoonbroodt et Michel Segers ont repris l’idée  de mobilité à Orp-Le-Grand : ces deux bénévoles amènent la grainothèque (photo 3) plusieurs mercredis par mois à la Cohésion sociale ou également au Repair café situé au Hall communal d’Orp-Le-Grand. De plus, les graines peuvent également être déposées dans les boîtes à livre d’Orp qu’utilise régulièrement Anne-Catherinne.

Activités des bibliothèques communales

Couramment, les bibliothèques communales mettent en valeur les grainothèques  en les accompagnant de livres sur les plantes, la nature, l’écologie tant pour les adultes que pour les enfants (photo 4). Il est important de sensibiliser les plus jeunes au jardinage (photo 5). Les bibliothèques sont des lieux de partage de biens collectifs. Les semences font partie de notre héritage et sont le fruit d’un travail collectif millénaire. Quoi de plus enrichissant et logique de relier les bibliothèques de semences aux bibliothèques de livres !

Autour de la grainothèque, les bibliothèques organisent souvent des bourses aux plantes et semences, des conférences, cinés-débats, portant sur le jardinage, sur les graines et leur bienfait dans notre alimentation. En trautres afin de relancer les grainothèques au printemps, les bibliothèque proposent comme à Verviers où des brunchs faits à base de produits locaux ont régulièrement lieu. Les bibliothèques ne manquent pas d’idées !

Semance, une grainothèque à Uccle

A Uccle, un réseau d’une dizaine de bénévoles a créé une grainothèque quasi professionnelle : Semance. (www.semance.be). Cette association produit ses propres semences, soit environ 450 variétés à ce jour qui sont notamment distribuées lors de la bourse annuelle au printemps à la place du Chat botté à Uccle. Les semences sont distribuées selon une participation libre. Les intéressés sont invités à participer, mais il n’y aucune obligation.  D’une part, les graines proviennent de parcelles mises à disposition par des particuliers dans les communes d’Uccle, de Rhode-Saint-Genèse, d’Ixelles et de Forest. D’autre-part, la production se développe aussi en réseaux, c’est-dire en collaboration avec des producteurs qui produisent des graines pour Semance. Ces bénévoles s’attèlent à développer  à Bruxelles un comptoir de production et de conservation de semences citoyennes et traditionnelles.

Les grainothèques en Wallonie et à Bruxelles

En 2019, l’engouement pour les grainothèques s’est amplifié avec une dizaine d’inaugurations. Aujourd’hui, en Fédération Wallonie-Bruxelles, on en compte plus d’une centaine comme vous le montre la carte ci-dessous. Il n’existe pas encore un réseau officiel structuré. Il faut noter que la Bibliothèque centrale de la province du Luxembourg accompagne les bibliothèques de cette province pour stimuler et développer ce genre de projet. Cet article est l’occasion de dresser un bilan de ce qui existe à l’heure actuelle. Un tableau présent en fin d’article reprend la liste actualisée des grainothèques répertoriées en Wallonie et à Bruxelles. Si l’un de vous constate qu’il manque une grainothèque présente dans votre commune, n’hésitez-pas à me contacter afin de compléter la base de données (mickael.teerlinck@gmail.com). 

Rendre ce que la nature nous donne

Dans certaines banques de semences citoyennes, les initiateurs encouragent les participants à rendre deux fois la quantité des variétés choisies. Ce principe lancé en Inde à Bidakkane (cf. carte ci-dessous), a permis à des populations démunies de retrouver une autonomie alimentaire. Celle-ci s’est perdue notamment par l’abandon des semences paysannes au détriment de semences OGM,  des semences F1 non reproductibles. Rendre plus que ce que l’on a donné est un principe présent dans le processus de la vie. En effet, la nature est intrinsèquement abondante. A titre d’exemple, une seule laitue produit des milliers de graines en une génération. Un plant d’amaranthe monte à parfois 300 000 graines ! Effectivement la nature rend bien plus que ce qu’on lui donne, cela devrait nous inspirer à en faire de même.

Encourager la sauvegarde et la création de nouvelles variétés

La générosité végétale s’exprime également par la diversité de variétés et d’espèces dont nous disposons pour nous nourrir. Néanmoins la FAO considère qu’en quelques décennies nous avons perdu plus de 75% de la biodiversité végétale cultivée ! Ce constat fait mal. N’y voyons pas forcément la fin mais plutôt comme une grosse piqûre de rappel. Toutes ces extinctions nous invitent à réagir, elles nous encouragent à créer de concert avec les plantes de toutes nouvelles variétés comme l’ont fait nos ancêtres pendant des milliers d’années. Les grainothèques nous invitent à sauvegarder les variétés de semences encore présentes dans les potagers de jardiniers passionnés mais également à participer à cette création de nouvelles variétés.

Conclusion

En conclusion, considérons l’émergence de ces grainothèques comme le reflet d’un désir grandissant d’un monde plus juste et davantage tourné vers la vie et la nature. Produire localement, être autonome alimentairement, c’est visiblement dans l’aire du temps. Réjouissons-nous en, et soutenons ces grainothèques qui permettent la sauvegarde et la valorisation de notre environnement.